La nuit, encore une fois… ah non, plutôt la tombée du jour. Le crépuscule, pour être plus précis. Le jeune vampire de Distraught avait décidé de voir la ville entourant l’académie sous un "jour" légèrement différent de celui sous lequel il la voyait à chacune de ses promenades nocturnes. Il était sorti de l’académie alors que le soleil était en train de disparaitre derrière l’horizon en couvrant, en guise d’au revoir, d’une magnifique lumière dorée le ciel couvert de nuages d’or qui se découpèrent ainsi du magnifique arrière-plan peint harmonieusement par le souverain diurne.

Ayant regardé ce séduisant spectacle pendant tout au plus une petite minute sans abandonner le masque mélancolique de son visage et sans sortir ses mains des poches de son pantalon cigarette noir, il avait amorcé sa promenade crépusculaire pour une énième sortie en solitaire.

Étant donné qu’il avait sélectionné une heure moins tardive pour visiter – une nouvelle fois – la ville de l’institut de ses rêves, il pouvait croiser quelques personnes qui avaient eu la même idée que lui. Ces personnes-là avaient bien entendu un but bien précis… se dégourdir les jambes, aller au parc, se recueillir sur la tombe d’un être cher parti faire sa vie ailleurs, aller dîner dans un restaurant… ce sans même se soucier que des créatures morphologiquement humaines mais naturellement différentes d’eux, voire surnaturelles, vivaient juste à côté d’eux, se fondant habilement dans leur masse.

Le jeune homme brun étant résolu à ne s’abreuver que du sang de personnes déjà attaquées par quelqu’un – et de préférence mortes – à cause de son principe relativement périlleux pour sa personne de rechigner à faire du mal à qui que ce soit et soucieux de ne pas laisser na nature vampirique prendre le dessus (laisser une lueur rouge apparaître dans ses yeux, sa dentition changer d’aspect, ou bien disparaître dans l’ombre d’un coin de rue sans crier gare…), personne ne savait ce qu’il était… Les seules personnes qui étaient au courant de cette précieuse information étaient quelques membres de l’académie Shaded à qui il avait délibérément avoué sa nature autant pas indifférence vis-à-vis des conséquences que par confort à l’idée d’être à l’abri de tout jugement au sein d’un tel milieu.

Bien entendu, pas que les personnes naïves et insouciantes à l’extérieur de la Shaded, mais également les véhicules polluants passaient dans les rues sans prêter la moindre attention à lui. Certains se lançaient à l’aventure sur le bitume comme un missile sans prêter attention aux panneaux qu’ils semblaient ne pas voir, d’autres avaient l’air de confondre le feu rouge avec le feu vert, ce qui pouvait créer un accident à 50% des cas… Sans oublier ceux qui aimaient à décorer le sol de leurs cigarettes aussi polluantes que malodorantes de tabac…

Kazuo ne bronchait pas, mais à l’intérieur il pensait que cette petite sortie réalisée plus tôt que d’habitude avait pour lui était relativement bénéfique ; il voyait maintenant les habitudes des gens alentours qui n’attendaient pas la nuit pour sortir en amoureux ou pour se vider trois bouteilles d’alcools dans le gosier, avachis sur un banc…

N’ayant pas de destination bien précise, il réalisa au bout de trois coins de rue qu’il ne savait pas trop où il allait et qu’il n’avait plus trop d’idées de lieux à visiter… Mais avec la soudaine traversée de cette idée, il réalisa qu’une présence en plus de lui dans cette ville n’était pas humaine. Elle était même inconnue… autant du point de vue familier que racial. Il décida de s’approcher…

Suivant la piste de cette sorte d’aura que dégageait encore la source inconnue de celle-ci, il longea encore trois ou quatre maisons avant d’arriver à la place de la fontaine. Mais il n’eut pas le temps de s’intéresser à cette dernière qu’il s’intéresse aussitôt à un banc sur lequel quelqu’un était allongé. Morte ? ou simplement endormie ? Fille ? Garçon ? Il ne pourrait répondre à cette série de questions qu’en s’approchant… ce qu’il fit.

Il s’approcha doucement de cette mystérieuse personne qui s’avéra alors être une jeune fille portant des lunettes. Des lunettes derrière lesquelles des yeux étaient fermées. Les mouvements de son tronc semblaient clairement indiquer qu’elle était plongée dans un sommeil qu’il ignorait s’il était léger ou de plomb… en effet, sa démarche étant plutôt légère et flottante, il serait passé à côté d’un angoissé aux aguets sans que celui-ci ne s’en fût aperçu.

Doucement, il lui mit la main sur l’épaule pour la réveiller sans prononcer un seul mot doux, peu importe quelle serait sa réaction. Il n’était de toute façon pas prudent de dormir au beau milieu d’une ville, surtout lorsqu’on était seul… et fragile.