« -Bon. Aller ma grande, allons-y ! »

Mais ma main s’arrête à quelques centimètres de la porte, le cœur battant, je me surprends même à trembler légèrement. Une dizaines de secondes s’écoulent.

« -Ahhh !! »

Je passe mes mains dans mes cheveux, me frottant énergiquement la tête.

« -Je vais pas y arriver ! »

Je soupir longuement. Je réalise que je suis totalement ridicule à stresser et m’agiter de la sorte devant la salle des profs. Je suis venue à cette heure car il n’avait pas cour. Et maintenant que je suis là, je n’arrive même pas à frapper à cette porte. D’ailleurs je ne sais toujours pas comment formuler ma requête.
Retrouver Jack… Avec Olive on avait réussi via le travail au travail de la mère de Jack de savoir que celle-ci travaillait pour un magazine Américain mais le service d’information n’avait pas voulut nous donner plus d’informations. Je voulais donc demander à M. LeDranngiskellwik de m’accompagner pour jouer le rôle de l’adulte responsable, sérieux. Mais en réfléchissant, pourquoi accepterait-il de m’aider ? D’accord il m’avait « sauvé », un certain lien suite à notre rencontre c’était installé. Un lien de confiance, d’écoute et de compréhension. Pour moi j’expliquerais ce lien comme celui que l’on peut avoir avec ces parents. Peut être qu’inconsciemment j’ai comblé le vide, l’absence de mes parents… Mais pour lui, qui était un professeur, mon prof d’histoire, ce rapport n’est surement pas apprécié dans l’éducation. En fait il y a tellement de raisons de ne pas accepter ma demande…

Mais je veux tellement le retrouver… Au souvenir de son visage, je ne peux empêcher les larmes d’embrumer mes yeux. Juste même le revoir qu’une fois, qu’une seule fois, lui dire que tout va bien et que je suis envie après toutes ces années. Mais en parlant de ça… Comment réagira-t-il à ma nouvelle forme, à mon nouvel état ? S’il réagissait comme les autres, s’il me rejetait ? Je n’aurais pas la force de surpasser cet abandon…

Serrant le poing, je propulse cette idée de mon esprit. Le seul moyen de le savoir c’est de le retrouver et de parler avec lui ! Reprenant courage, le regard déterminé, je suis prête à tout ! Même si il le faut, je ligoterai mon professeur avec des gousses d’ails ! M’apprêtant à frapper la porte, celle-ci s’ouvre, devançant mon geste. Cette fois je ne peux plus reculer et je ne reculerais pas.

La neige saupoudrait l'ensemble de l’académie recouvrant la moindre parcelle de verdure givrée ou de chemins pavés d'une douce matière légère et immaculée, dans la lumière obscure de cette fin de journée hivernale. La nuit était de mesure. Chaque élève était dans son chez soi, les plus rêveurs regardant depuis leur antre chaleureuse ce spectacle. Tout comme l'unique professeur encore en service – du moins en présence – dans la bâtisse scolaire. Wojjaem contemplait ces flocons de sortie a travers une épaisse vitre de la salle des enseignants, où il s'y trouvait seul a cette heure tardive.Le lieu était très boisé avec de grandes étagères en chêne remplis d'ouvrages tous plus épais les uns que les autres tout de reliure en cuir, un parquet luisant courrait sur le sol tandis que de larges tapis de pourpre et de saphir – de même couleur que les somptueux rideaux qui encadraient les fenêtres – les habillaient, ces derniers recouvert par des tables sculptées aux remontoirs en verres ainsi que par des fauteuil aux teintes bordeaux et d'un moelleux très confortable donnant au lieu une identité propre, avec un certain charme, une ambiance feutrée. Pour ajouter a cette atmosphère tamisée, nombre de lustres propageaient une lumière diffuse. Pourtant le professeur avait opté pour un chandelier et travaillait a la flamme vacillante des bougies, lui évoquant une nostalgie propre à un passé lointain et une bibliothèque que possédaient sa demeure familiale d'autrefois. Plume en main, le vampire avait décidé de corriger ses devoir pour faire fuir le jour dans cet espace paisible et assez renfermé sur lui-même, pour ensuite rentrer chez lui libre d'obligations et sous une nuit accueillante et annonciatrice de bien-être auprès de sa reine.

Les iris rubis retournèrent leur attention sur les manuscrits – maladroits et si rarement brillants – afin d'y aller de son commentaire calligraphié face a l'apprentissage des connaissances qu'il s'évertuait d'inculquer a ses jeunes gens. La dernière note attribuée, le dernier point posé, Wojjaem en profita pour s’accorder quelques minutes , rien qu'à lui. Adossé dans son fauteuil, les yeux clos, il prit une large respiration, humant l'air de la pièce, destinée a lui seul à cette heure. Il sentait la tiédeur du lieu s'engouffrer en lui et s'ajoutait a cette impression, la chaleur de son corps, tout en s'imaginant le visage de sa belle se peindre devant lui. Cependant, quelqu'un approchait.

L'ouïe développée et l'odorat en éveil, il décerna une présence proche. Étrange en ce lieu et en cette nuit tombée. Pourtant, l'être de la nuit ne fût guère surpris et se dirigea d'un pas mesuré vers la porte massive. Main sur la poignée, il l’enclenchant puis l'ouvrant, laissant découvrir une chevelure des plus claire et un poing levé soit la personne qu'il avait deviné et qui venait incontestablement a sa rencontre. Rirï Kioku se tenait devant lui et c'était sans mal qu'il l'avait entendu approcher par delà sa venue, avec ses pas de félins, son parfum qui était sien et ce dérangement au règlement pour le voir lui. En effet, depuis leur entrevue sur le toit, Wojjaem avait pû apprendre a connaître davantage Rirï en classe a travers ses cours et son évolution progressive dans le sens de la lumière. Il c'était passé quelque chose entre eux et tout deux en étaient conscients. D'ailleurs, la Demoiselle Blanche semblait prendre Wojjaem pour une personne d'importance – un repère ? - car la connaissant en élève studieuse, elle n'aurait pas déranger au couvre feu pour n'importe qu'elle bêtise et si elle se trouvait devant lui, c'était d'ordre important, qui lui tenait a cœur et qui n'avait rien d'anodin. C'est avec considérations de toutes ces réflexions que Wojjaem s'adressa d'une voix calme

Bonsoir Mademoiselle Kioku. Que me vaux l'honneur de votre visite en cette horaire où les étoiles sont déjà de rigueur ?

Respectueux, direct dans ces propos - allant droit au but - et toujours aussi mystérieux qu'a son habitude.